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Un désir glissant

Publié par : Shaari34 le 14/03/2018

Le sourire d’une femme peut me faire littéralement craquer. Évidemment, il ne faut pas que son corps soit difforme, mais si la silhouette n’est pas trop maigre, c’est des lèvres de cette personne que viendra ma première émotion. En second, les yeux !


Ne soyons pas hypocrite ; bien sûr que j’aurai fait le tour des formes de la personne, mais c’est sur ses yeux que je m’accrocherai, si le sourire est au rendez-vous.


C’est comme ça que Valérie est entrée dans mon cœur.


Nous nous connaissions depuis déjà des années pour le travail. Nos carrières nous ont amenés à être éloignés l’un de l’autre pendant longtemps mais là, depuis un an, nous sommes à nouveau proches l’un de l’autre. Son humeur joyeuse l’entraîne dans des éclats de rires incroyables qui m’émeuvent à chaque fois. De plus, elle a les yeux qui pétillent, du vrai champagne ! Je ne dirais pas qu’elle me porte à l’érection dès que je la vois, non, mais, je ressens cette émotion qui vous remplit le corps, qui vous noue délicieusement la gorge et vous plonge dans une gêne si exquise.


Comment la décrire ? Trente-cinq ans passés, mariée, deux enfants, cheveux châtains et yeux marron qui respirent la malice, taille moyenne, de bonnes joues qui se gonflent si joliment quand elle rit, des formes avantageuses comme je les aime, c’est à dire une poitrine généreuse mais pas plantureuse quand même, plantée sur un bassin solide (c’est vrai que la maigreur ne m’inspire pas du tout). Avec en prime, ce cadeau royal d’un sourire qui me secoue irrésistiblement. Mais elle ne sait rien de mes sentiments. Je n’en suis qu’au stade du fantasme que jusqu’à présent, je n’ai concrétisé que seul, avec ma main droite.


Ce matin, nous sommes assis côte à côte, dans un lieu qui nous est inhabituel : un laboratoire pharmaceutique. C’est samedi et je ne pensais pas que nous rencontrerions en pareil endroit. Nous sommes venus tous les deux pour une prise de sang ; je n’ai pas l’audace de lui demander pourquoi elle en a besoin. Pour moi, à quarante-cinq ans, il s’agit d’un petit contrôle pour voir si le taux de cholestérol n’a pas atteint la limite supérieure autorisée !


Après la bise et quelques banalités, le silence a repris la place qui est la sienne dans ce genre d’endroit. Je me sens tout chose, je la regarde mais je ne sais quoi dire. J’ai tellement de révélations à lui faire.


Nous ne sommes plus que tous les deux dans cette salle d’attente, la brave dame qui nous tenait compagnie vient d’être appelée par un homme en blouse blanche ; c’est comique de la voir aussitôt monopoliser son attention en lui racontant tous ses malheurs, et elle en a. Il n’en faut pas plus pour que Valérie se mette à rire. Ah ! Ce rire ! Moi, je ne ris pas ! Je bois littéralement ses yeux ! « Si seulement j’avais la force d’oser te dire tout ce que j’ai envie de te dire ! » pensai-je.


A-t-elle lu quelque chose dans mon regard ? En tout cas, elle m’interroge :


— Qu’est-ce qu’il y a ? Tu en fais une tête ! Pourquoi me fixes-tu comme ça ?

Je ne sais quoi lui dire. Elle me taquine :


— Quoi ? J’ai mal mis mon rouge à lèvres ? J’ai une tache sur la joue ?

C’est à mon tour de sourire ! (Un sourire bête, sûrement). Et je la fixe toujours des yeux. Délicatement, presque imperceptiblement, son visage rosit. Elle semble émue par mon attitude. Je devrais en profiter, mais je n’y arrive pas.


Voilà qu’on vient la chercher. Elle s’en va et avant de disparaître dans le couloir, elle se retourne et me sourit. Quel nigaud je suis ! Les occasions où nous sommes seuls sont plutôt rares. Pour une fois que j’en tenais une, je l’ai bêtement gâchée. Je suis plongé dans mes pensées quand une petite voix me fait sursauter :


— Monsieur ! C’est à vous !

Dix minutes plus tard, je ressors du laboratoire. Valérie est partie, naturellement.


Je gagne le parking, et, à ma surprise, je la vois qui s’affaire autour d’un véhicule.


— Ah ! les salauds, tu as vu ce qu’ils ont fait à ma portière !
— Qui ça ?
— Je ne sais pas, évidemment !

Elle est très fâchée ; je la découvre femme en colère et se dégage de sa personne une autre beauté que je ne lui connaissais pas. La colère peut embellir ! ! Je la regarde, elle parle, je ne l’entends pas puisque je la regarde encore et toujours.


— Mais tu peux me dire pourquoi tu me regardes comme ça ? Tu me trouves drôle, peut-être ? Ça t’amuse de me voir dans cet état ? Je voudrais t’y voir, moi ; une voiture que je commence seulement à rembourser ? Et puis arrête de me regarder, tu m’énerves !

Je baisse les yeux ! Je n’ai pas voulu lui faire de peine et j’ai réussi du premier coup !

Maintenant, elle fond en larmes ! Je m’approche pour lui donner mon épaule mais elle se dégage.


Nous sommes l’un à côté de l’autre, elle, effondrée, et moi, planté comme un poireau ! Je la laisse récupérer.


— Excuse-moi, me dit-elle.
— Bah ! Pourquoi ?
— Je me suis énervée !
— Mais non !
— Quand j’y pense, les salauds !
— …
— Pi aussi, pourquoi tu me fixes tout le temps comme ça !

Et là, les mots me viennent sans réfléchir :


— J’aime tes yeux, on dirait du champagne tellement ils pétillent !
— C’est gentil, ça ! Ça ne répare pas ma voiture, mais c’est gentil quand même. Tu en as d’autres comme ça !
— …

Pour toute réponse, je me sens envahi par une vague de chaleur que la rougeur de mes joues doit dévoiler.

« Dommage », murmure-t-elle en montant dans sa voiture. Elle met le moteur en route. Je me sens tenaillé par cette peur de lui parler et pourtant, alors qu’elle démarre, je me précipite à sa portière. Elle stoppe, baisse la vitre et je lui avoue :


— J’ai tellement envie de toi !

Ma franchise l’a surprise. Comme à son tour, elle ne sait quoi dire, elle appuie sur la pédale de l’accélérateur, et je vois la voiture me fuir. Son regard ne m’a laissé que bien peu d’espoir. Surprise, ça c’est sûr ; ravie, j’en doute. Son sourire légendaire avait disparu.


« Quel couillon ! Pourquoi suis-je allé lui dire que je la désirais ! »


Je parle tout seul, dans ce parking. Un couple qui passe près de moi et qui me jette un regard perplexe, me ramène au silence. Mais, quand même, qu’est-ce qui m’a pris ! Il fallait prendre son temps : lui offrir des fleurs ou un dîner ; enfin, la courtiser, la séduire et non se jeter sur elle comme un malappris.


Tout le week-end, ma femme me trouve bizarre.


— Quelques soucis de travail ! lui dis-je, pour couper court à toute discussion.

En ce lundi matin, il n’y a pas dix minutes que je suis arrivé au travail, que je me retrouve en sa compagnie. Fort heureusement, nous ne sommes pas seuls. Elle a son sourire habituel. À la voir, il semblerait que je ne lui ai rien dit. Finalement, je suis presque déçu ! Je m’attendais à ce qu’elle me fasse la tête ou qu’elle me jette des regards qui ne soient pas aussi neutres. Non, rien de tout ça ! À croire que mes propos sont tombés dans les oubliettes de sa mémoire. Ça ne comptait pas !


La semaine se passe, tristement banale. Elle, elle est enjouée comme à son habitude, n’évitant même pas mon regard. Nous travaillons dans la joie de l’instant présent, et c’est tout. Vraiment, cette rencontre n’a été un temps fort que pour moi.


Vendredi, en fin de journée, Marc, un collègue propose à l’équipe (nous sommes sept à travailler sur le même projet), de se retrouver, le lendemain, pour un après-midi badminton.


Le lendemain, nous sommes quatre à franchir les portes du gymnase : Valérie qui est venue avec son mari, Marc et moi. Les autres ont déclaré forfait.

Je suis certes troublé d’être en compagnie de la femme de mes songes mais également inquiet par la présence de son époux. Et si elle lui avait parlé ? C’est un coup à me retrouver avec son poing dans la figure. Les premiers moments sont difficiles ; je n’ose parler, attendant une quelconque réaction de sa part. C’est tout le contraire qui se produit. Il est fort sympathique, ne dédaignant pas la plaisanterie. Nous jouons en tournantes (on change de partenaire à chaque partie de 15 points – règlement très personnel –).


Une bonne heure de jeu, pour un petit sportif comme moi, c’est plus que suffisant : je jette l’éponge et réclame une pause. Marc en profite pour s’esquiver (une visite à une amie, nous explique-t-il) et je m’assois pour regarder Valérie et Christophe (son mari) jouer. Honnêtement, mes yeux s’attardent beaucoup plus sur Valérie : ses seins qui bougent au moindre mouvement de bras ou au plus petit déplacement, son sourire qu’elle nous distille, ses délicieuses mimiques quand elle perd le point.


Le gymnase, petit à petit, se vide de ses occupants, et ils jouent toujours.


— À la douche, crie soudain Valérie.

Nous regagnons les vestiaires, Christophe et moi, laiss ...

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