J'ai 24 ans. Je suis à Plappeville, à côté de Metz, dans un fort militaire datant de Napoléon, pour y effectuer mes classes. Je suis sursitaire à cause de mes longues études. Je ne suis pas le seul dans ce cas mais il y a d'autres garçons plus jeunes dans ma section, c'est le fameux brassage social malheureusement perdu avec la disparition du service militaire obligatoire. Le premier jour, je remarque un jeune garçon de 18 ans, un véritable dieu grec, les cheveux longs, blonds, un visage d'ange, un corps athlétique – il me dira plus tard qu'il pratique la boxe – mais avec un air renfrogné du genre révolté de se trouver là involontairement, un rebelle anti-militariste. J'apprends indirectement qu'il s'appelle Yannick Robic – comme le coureur cycliste. Ce nom, je ne l'ai jamais oublié, il est encore gravé dans ma mémoire, cette rencontre a été pour moi extrêmement marquante.
Nous passons un par un chez le coiffeur pour subir la coupe réglementaire. Au moment où Yannick passe sous la tondeuse, je vois que son visage se décompose de rage de voir progressivement sa magnifique chevelure tomber à ses pieds. C'est un véritable massacre ! En sortant du salon de coiffure, il ne décolère pas
et jette quelques mots d'insulte contre l'armée. Un caractère bien trempé, le garçon !
Plus tard, toute la section, une vingtaine de garçons, se retrouvent dans un grand dortoir meublé de deux rangées de lits se faisant face et séparés par des vestiaires métalliques, ce qui me fait vaguement penser aux colonies de vacances que j'ai tant aimé pour les copains que j'ai pu avoir enfin loin du carcan familial.
Pour la nuit, j'avais choisi d'emporter un pyjama vert pomme avec deux tons, le bas plus clair que le haut, pas très discret, détail "légèrement" important pour la suite...
(Il est presque une heure du matin. J’éteins mon ordinateur. Je n'est pas sommeil mais je dois quand même aller me coucher. Je regagne ma(notre) chambre. Je me couche mais ne trouve pas facilement la paix dans ma tête. J'ai allumé la radio, comme tous les soirs, pour me distraire de mes pensées mais ce soir ça ne marche pas. Mon esprit est survolté, parcouru de phrases qui me viennent et que je veux retranscrire dès demain.
Au matin du lendemain, je me lève vers les huit heures. C'est plus tôt que d'habitude. Un jour ordinaire de janvier 2023 commence. L'extraordinaire, c'est dehors, la présence de la neige, une couche pas très épaisse mais suffisante pour recouvrir tout le jardin de mes voisins du dessous, tous les toits et toute la végétation. Notamment un gigantesque sapin qui me rappelle la forêt de conifères, en haut du Col de la Chavade, que nous avions traversée en voiture avec Denis au beau milieu d'une tempête de neige. Je n'en menais pas large mais Denis, comme à son habitude restait parfaitement serein, maîtrisant parfaitement la situation. C'était extraordinaire comme je me sentais en sécurité avec lui.
Je prépare le petit déjeuner. Je suis pressé de retourné à mon clavier, une sorte de frénésie s'est emparée de moi. Ce matin, la tranche de pain grillé sera sans beurre, trop long à étalé. Je me contente de la confiture de Denis – sur le pot une étiquette précise "Poires 2011". Je l'étale avec amour et gourmandise sur la tranche de pain.
Petit déjeuner terminé, je prépare l'indispensable café, très fort pour dynamiser mon cerveau, accompagné du non moins indispensable carré de chocolat. En face de moi, deux photos de Denis. Sur l'une d'elle, il tient d'une main une bouteille de Cointreau et une assiette de crêpes de l'autre. Denis me regarde. Presque partout dans l'appartement, dans les pièces principales, il ne me quitte jamais des yeux. Mon Denis est à jamais avec moi et voit tout ce que je fais, sait tout ce que je pense.
Café bu, la vaisselle et la douche attendront, je m'en fiche. C'est ça l'intérêt d'être seul, aucune contrainte, aucune obligation. C'est horrible !
Je rallume mon ordinateur. Il est lent à démarrer. Je m'impatiente. J'allume la radio pour tuer le silence, oppressant. FIP me tient compagnie, pas trop envahissant, juste de la musique, pour ne pas me distraire.
L'ordinateur a démarré, Denis est sur la page d'accueil et moi, j'ai la tête amoureusement penchée sur son épaule.
J'ouvre le fichier de mes écrits, je reprends mes frappes sur le clavier et le cours de mon histoire militaro-sentimentale au Fort de Plappeville.)
Dans notre apprentissage militaire est prévue la marche au pas cadencé, en formation deux par deux, en colonne les uns derrière les autres. Le hasard faisant magnifiquement les choses, je suis placé juste derrière Yannick. Mes yeux ne quittent pas sa nuque. Une nuque absolument parfaite, découverte grâce à sa coupe de
cheveux courts et que je peux donc admirer tout mon saoul. Une nuque large et musclée mais pas trop et des cheveux courts qui lui donnent un air viril malgré sa jeunesse presque enfantine, sur des épaules musclées, elles aussi. Pour cet exercice militaire, nous sommes obligés de porter un treillis kaki, très ajusté, très moulant et comme il fait chaud – c'est l'été – un simple tee-shirt suffisamment court pour laisser visible toutle bas du corps. C'est le genre de tenue qui pourrait rendre sexy n'importe quel gars, même mal foutu en civil alors quand c'est Yannick qui la porte… Mes yeux passent de sa nuque à ses cuisses et ses fesses, sublimement rebondies, qui me donnent envie de les mordre tendrement comme on croque une pomme juteuse et sucrée. J'essaie, difficilement, de ne pas perdre le rythme de la marche et de suivre les ordres du sergent qui nous instruit: « A mon commandement, stop ! Demi-tour à droite ! En avant, marche ! Demi-tour à gauche ! ». Fatalement, par moment, par ces changements répétés, Yannick se retrouve derrière moi. Alors je me prends à imaginer ce qu'il voit, ce qu'il regarde ; et si c'est moi, ce qu'il pense de moi. J'espère simplement qu'il ne pense pas de mal de moi compte tenu de notre différence sociale – lui 18 ans, d'une famille modeste et moi l'intellectuel diplômé – et que peut-être, au fil du temps, les jours passant, il me trouvera sympathique ; et même plus sympathique que les autres ! Je vais faire tout mon possible pour ça…
Les autres détestent peut-être la marche au pas cadencé, moi j'adore ça !
Le temps s'écoule agréablement. Je trouve Yannick alors encore plus beau qu'au premier jour alors qu'il avait les cheveux longs, un mélange d'homme viril et d'enfant, terriblement touchant, attirant, sensuel. Un physique comme j'en ai souvent rêvé, non seulement chez un futur compagnon mais aussi pour moi qui, par la suite, me suis adonné, vainement, obsessionnellement, à la musculation devenue, un temps, comme une drogue. Yannick devient d'autant plus séduisant, irrésistible, que, progressivement, sa colère et sa révolte l'abandonne et qu'il se révèle être un garçon charmant, intelligent, joueur, plaisantant souvent.
Et ce que j'espérais se produit, je parviens à gagner sa sympathie mieux que les autres. Nous nous appelons par nos prénoms. Lors de nos moments de liberté, Yannick ne suit pas le groupe, il me suit. Nous nous isolons. Tout autour et à l'intérieur du fort il y a de la verdure, des prairies. Nous nous installons dans une prairie en pente douce. A demi allongés, nous discutons. Lui me parle de lui et de sa famille, moi je parle de moi et de ma famille.
Entre deux dévoilements réciproques, il me sort brutalement:
« La première fois que je t'ai vu avec ton pyjama vert, je me suis dit : qu'est-ce que c'est que ce mec-là avec cet horrible pyjama ? »
A cet instant, je prends conscience qu'à cause d'un simple pyjama, j'ai failli devoir me contenter de fantasmes obsessionnels et horriblement frustrants; j'ai failli ne jamais vivre ces magnifiques moments d'échanges, que nous avons renouvelés chaque fois que c'était possible. Je suis à la fois heureux et fier de cette petite victoire et je la savoure délicieusement. Je réalise que Yannick, finalement, est heureux d'être là, avec moi et cette pensée décuple mon bonheur. Il m'interroge sur ce que j'ai fait au cours de ma dernière permission. Je lui raconte n'importe quoi mais évidemment pas la vérité de ma vie de couple qui débutait avec Jean.
Cependant, ces conversations, ces moments de complicité ne sont pas complètement exempts de frustration : je n'ose pas lui avouer que je suis gay et que je le désire terriblement, sa sensualité me subjugue et il n'en a même pas conscience.
(Écrire ces mots, là maintenant en 2023, cinquante ans après, me font encore monter les larmes. Et à la radio, à ce moment précis, comme un clin d’œil absolument sadique, Elton John chante '' Your song'', une ode à l'amour d'un jeune garçon dont il ne sait plus exactement la couleur des yeux, ''verts ou bien bleus'', mais qui sont ''les yeux les plus doux que j'aie jamais vus''.)
J'en ai terriblement envie mais si je lui avoue ça, j'ai peur de le perdre. Pire, j'ai peur d'une mauvaise réaction, brutale. Torturé dans ma tête et dans mon cœur qui balancent entre la franchise, risquée, et la lâcheté, préservant l'avenir, je choisis la lâcheté, le silence et la frustration. Avec le regret de ne jamais savoir quelle aurait été sa réaction ...
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